L'instant Décalé D'Olivier épisodes 3 & 4
L'Instant Décalé
présenté par
Olivier
Episode 3 : vendredi 16 Juin 2017
Vous avez remarqué dans les champs, en ce moment, y’a
plein de coquelicot. Je trouve ça beau. Coloré. Toutes ces petites taches
rouges, c’est agréable à regarder. Reposant. Aussi apaisant pour la tension que
de mater une paire de nichons. Enfin c’est ce qui se dit dans le milieu médical,
moi je suis pas médecin, j’affirme rien.
Mais bon, de toute façon, on va parler d’autre chose
parce que la poésie c’est pas trop mon truc.
On va plutôt parler du clinquant, de la pépète, de la
pépite. De la pépite d’or. Parce qu’il y a 120 ans tout juste aujourd’hui,
débutait la ruée vers l’or en Alaska. Alors peut-être qu’il y a eu des filous
pour
débusquer le filon avant le coup de
feu officiel, c’est même probable, mais c’est cette date qui fut arrêtée comme
référence historique.
Alors question couleur, comparé à un champ de coquelicot,
une chasse au trésor en Alaska c’est un peu plus fade. Des petites taches
jaunes égarées sur l’immensité immaculée des terres gelées, ça me fait penser à
autre chose qu’à un odorant champ bucolique ou vont butiner les petites
abeilles gonflées au pollen. Non, ça me rappelle plus mon jardin un petit matin
d’hiver après avoir lâché le chien resté cloitré 12h dans le cagibi.
Enfin… ça c’est la version officielle. Parce qu’en fait…
mais surtout le répétez pas… c’était moi.
C’est moi qui cette nuit là me suis hasardé dans le
jardin, vers 2h du matin, après avoir ingurgité avec des potes le stock de
marchandise d’un petit brasseur du village d’à côté.
Mais ça m’arrange bien que l’histoire ne retienne pas
cette version. Après tout, ça sert à ça les clébards, à dédouaner l’homme de
son irresponsabilité chronique.
Et en parlant de clébard, tient, faut que je vous parle
de quelque chose. J’étais affalé dans un bar, sur une table aux carreaux de
faïences écaillés quand j’entendis, pas si loin que ça, un bruit de clébard se
radiner. Habitué à ce que ce genre de bestiole poilu vienne se frotter sur ma
jambe, je me tenais prêt à dégainer le coup de tibia.
C’était, il y a une semaine à peu près, et il faisait
déjà très chaud. J’attaquais ma deuxième limonade au sirop de fruit rouge
pendant qu’à la radio, un groupe de punk breton alcoolisé chantait leur refrain
à tue-tête. Et ça ne faisait pas qu’aboyer, non non non, ça murmurait parfois,
ça susurrait, ça suggérait une atmosphère à la Bukowski. A la Chinanski…
C’était bien. Sauf que je ne voyais toujours pas ces
foutus clébards arriver.
Il avait bien prévenu Lolo le serveur, j’avais pas
rêvé:
« Tiens, les clébards qui pointent leur nez, ça
faisait longtemps. »
C’était bien sorti
de sa bouche ces mots-là !
Et bah non ! Toujours rien à l’horizon.
Je ne voyais rien et je pouvais toujours attendre, parce
que les clébards, ils étaient déjà bel et bien là sans être bel et bien là.
« Mais les Clébards ducon, ils sont à la radio. Les
Clébards, tu connais pas ? Mais tu sors d’où ?
Alors pour vous
éviter de passer pour un inculte comme j’ai pu l’être, voici pour ceux qui ne
connaissent pas… et les autres aussi d’ailleurs, les Clébards, avec « Pas
envie d’me taire » un titre tiré de leur dernier album sorti le 26 mai,
« On attend… »
*
**
Episode 4 : Vendredi 30 Juin 2017
La semaine dernière, on a
eu droit à la fête de la musique. Je me devais d’en parler, même avec un peu de
retard. Mercredi dernier donc,
c’était l’occasion pour tous les zicos de ressortir leur instruments, et pour ma voisine de dépoussiérer son engin musical préféré. Le clairon. Non, je déconne. Elle possède un appareil bien plus percutant. D’ailleurs, je ne sais même pas dans quelle catégorie on peut l’intégrer. Instrument à vent, à percussion, à gratter ? Je sais pas. Vous le classeriez où vous, le balai ? Une chose de sûr, c’est qu’elle est pas du genre à l’utiliser comme guitare. Par contre pour tambouriner contre les murs c’est une championne. En période de crise, c’est fête de la musique trois fois par semaine dans l’immeuble.
Au début on se dit : « Tiens
c’est original. Ce rythme, cette mélodie. »
Et puis c’est comme tout, on
se lasse. Toujours le même tempo, pas une seule fausse note en 5 ans. Aucune
originalité.
Des fois t’as envie de lui
dire : « Le balai mamie, il n’a pas qu’un manche. Les poils bon sang,
sert toi des poils, apporte une touche Jazzy à ton concerto pour motard en rut,
une douceur à tes revendications égocentriques… »
Enfin bref, elle pollue
déjà suffisamment ma vie, à peu près autant qu’une lingette desséchée pour tout
dire, elle va pas me pourrir ma chronique.
Changeons de sujet. Et
retournons à une époque bien antérieure. J’ai dégoté sur le net une formation
de 6 musiciens Jazzy du sud de la Californie, qui ceci dit doivent être dans un
piteux état aujourd’hui sachant que la vidéo date de la fin des années 1910… Et
pourtant, en ce temps, ils s’égosillaient, ils se dandinaient, ils dégageaient
grave au fond d’une cave, sur la scène d’un bar morne de la banlieue de Los
Angeles.
Je vais vous raconter
l’histoire de trois belles gueules de rockers orléanais. De Gigi, bassiste au
talent inversement proportionnel à l’éclat de son sourire. De Phil, aussi
constant dans l’art de taper sur des peaux tendus que d’envoyer valdinguer ses
baguettes ; Tout en puissance. Et enfin de Vince, le regard pétillant et
la voix de lover qui inocule sans répit à l’innocent micro argenté son haleine
au relent de breuvage belge.
« Mais recule toi de
quelques centimètres bon sang ! Tu l’étouffes là, laisse le respirer.»
Des beaux gosses chez les
hardos y’en a mal. Mais des mecs classes, sur toute la ligne… alors ça… si
c’est pas un paradoxe ! Enfin bref…
Parlons d’autre chose
parce que finalement, ces gars là, on s’en fout un peu. Parce que le soir de la
fête de la musique ils ont du passer plus de temps à picoler qu’à jouer… Et surtout
je vais vite changer de sujet avant de tomber amoureux… le tatouage et le poil
rebelle… Pouahhhh. Pas de ça avec moi.
Je vais plutôt vous parler
d’un gros coup de cœur pour des musiciens au féminin… Ca se dit ça, des
musiciens au féminin… Nan. Bah tant pis, c’est dit.
Un coup de cœur comme ça,
ça peut arriver à tous les coins de rue. La magie l’imprévu.
C’est vieux, mais faut que
je vous raconte quand même cette fête de la musique qui m’a laissé un sentiment
inoubliable. Ca remonte à pas mal d’années, je vous dirais plus tard combien de
temps exactement, mais va falloir être patient.
Ce que vous allez écouter tout
à l’heure est une archive, je pense, introuvable. Elle m’est tombée entre les
mains de manière assez classique. On découvre un artiste lors d’un festival ou
d’une fête quelconque, on file sur le net en écouter un peu plus et on devient
fan… ou pas. Et grâce au pouvoir du stockage numérique, on peut les conserver
des années et des années et les redécouvrir après les avoir totalement oublié.
Voilà comment tout à
commencer avec ce duo. Deux femmes et autant d’instruments qui me figent un
long moment à écouter les uns après les autres les quelques chansons de cette
charmante formation. Deux voix, deux sons plaintifs d’instruments mélodieux que
la nuit englobait peu à peu et qui me figent au milieu d’une rue surchargée et
bruyante où d’habitude s’entassent des groupes plus hardcore.
De retour à la maison, je
file sur leur site internet, quelques titres en téléchargement, des maquettes,
et j’envoie la sauce… 512ko/sec… on est en 2005. Et voilà stocké à vie sur mon
disque dur ces quelques morceaux restés à l’état brut.
Et puis… la vie et ses
méandres ont agit. L’entité musicale disparu sans laisser de traces, dissout
quelques mois après s’être produite sur une petite scène locale de la fête de
la musique de l’année 2005.
Pas de concrétisation
d’album, plus de site. Plus de nouvelles. Silence radio. Les messages cordiaux
échangés les jours qui ont suivi la rencontre finirent par s’effacer de mon pc
suite aux différents changements d’opérateurs.
Mais même si la formation
a disparu je suis persuadé qu’aujourd’hui encore, ces deux femmes, sous une
autre identité, réchauffent à travers leur voix le cœur d’hommes et de femmes
comme elles ont su le faire avec moi un soir de 21 juin 2005 où solitaire,
j’errais dans les ruelles étouffantes du centre-ville d’Orléans.
Et ce qui serait
complètement dingue, c’est qu’un auditeur se dise :
« Mais… mais je
connais ! C’est « Machine » qui chante ! Bah oui, c’est
elle ! »
Et comme la musique ne
meurt jamais, on va faire revivre quelques minutes ces notes et ces mots
assemblés il y a plus d’une décennie.
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