Instant Décalé #18

L'instant Décalé

présenté par



Olivier

Aujourd’hui, j’ai le regret de vous annoncer que… c’est la journée internationale… de la bible. Et quoi de mieux pour ravir mon tempérament contestataire que ce ramassis de conneries. Parce qu’il faut savoir, que depuis quasiment toujours, je suis un homme athée en plus d’avoir été, plus jeune, garçon de café. Bon, ça vole pas haut, c’est vrai.
Je le reconnais. Du coup, vu l’inspiration que m’offre cet édifiant dogme de cloisonnement cérébral et de ratatinement spirituel, faut-il vraiment que je développe ici une chronique sur la bible ou la religion, quel qu’elle soit, que les frustrés ne m’accusent pas d’en accabler plus une que l’autre. Personnellement, je ne préfère pas tenter l’aventure et rester dans ma case décalée qui me sied si bien, pour ne surtout pas tomber dans la vile méchanceté assaisonnée de ci de là de quelques poils de salace vulgarité. Tournons donc la page de la bible, et dirigeons nous plutôt vers un domaine qui ravit l’homme libre : abordons tout de suite la poésie, en guise d’introduction de l’atelier d’Eric. Alors je vais faire court pour lui laisser un max de temps de parole.
Pour clôturer la chronique de ce soir, je voulais vous lire un très court poème de moi-même en lieu et place de l’habituelle chanson de conclusion. Mais j’ai foiré. Je voulais écrire un petit texte avec beaucoup de rimes, mais sans contraintes. Juste des mots pour évoquer des images. Ca fait un peu slogan de magazine des années 80 ça, les mots, les images. Le poids des mots, le choc des photos !
Mais voilà donc, comme je disais, la contrainte, le challenge m’ennuie. Pareil, j’aime me laisser bercer par la poésie des mots, mais la grandiloquence de certains grands maitres poétistes, me fait chier. Les contraintes calculatrices, du nombre de pieds, du nombre de vers, ne m’intéresse que dans la mesure où le nombre de verre à pied est suffisant pour passer une bonne soirée. Et puis la contrainte est tellement contraire à mon esprit libertaire même si, il faut le reconnaitre, elle a tendance à pousser au dépassement de soi.
Mais je m’en fous et préfère de loin me prélasser dans le futile et l’inutile que foncer tête baissée dans la compétition.
Alors faut-il quand même que je passe à la casserole de la catégorisation, pour, éventuellement, tenter une dégorétisation de ma valeur sociale ? Oui… et non. Mais comme je suis plein de bonne volonté, j’ai tenté l’expérience, qui a, comme on pouvait s’en douter, tourné court. J’avais décidé de me fixer une contrainte abracadabrante, un exercice de style à la construction gymnastico-mathématique tirée du vaste répertoire oulipien, dont fait notamment partis le fameux lipogramme de Georges Pérec, que tout le monde connait, bien évidemment. N’ayant rien trouvé qui me convenait, je décidais d’en élaborer une moi-même, avec, comme difficulté unique, celle de n’utiliser que des mots comportant au moins… une voyelle. Et puis, je me suis dit que non… « que non », je fais un petit intermède, étant le masculin de guenon, bien évidemment, mais ça tout le monde le savait aussi !
Que non donc, c’est trop facile. Et puis, quand on regarde bien… elle est où la parité là dedans ? Bon sang. Pourquoi retrouve-t-on toujours sur l’échiquier vocal, plus de consonnes que de voyelles ? Pourquoi utilise-t-on deux tiers de plus de consonnes que de voyelles dans nos conversations ? Je tentais donc de m’attaquer à cette injustice en me contraignant à cet asservissement inédit, en rétablissant la parité lettrique à 50/50. Mais, à peine suggéré, ce chantier me parut déjà un peu trop ambitieux pour le laborieux travailleur que je suis. Et si, pensais-je de ma petite voix intérieure, dans un premier temps, j’envisageais un recentrage de 35% de voyelles pour 60% de consonnes, ça serait déjà pas mal. Le reste, parce qu’on arrive qu’à 95%, étant libre de droit pour toute  ponctuation désireuse de venir prendre place au sein du texte.
Donc ce soir, vous l’aurez compris, vous n’aurez pas de poème de ma part, mise à part les quelques Haïkus que j’ai fais parvenir à Eric, s’il veut bien les lire, car je préfère, et de loin, l’univers plus fantasque des pataphysiciens que celui de son digne héritier qu’est  l’ouvroir de littérature potentielle. Entre la contrainte mathématique et la science des solutions imaginaires, y’a pas photos, je choisi celle vantant les vertus du temps libre et de l’inutile, avec cette tortueuse vision en total décalage du regard traditionnel.









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