Instant Décalé # 21
L'instant Décalé
présenté par
Olivier
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Ce soir, on va parler de
boomerang. On parle plus trop de boomerang ces dernières années, je sais pas si
vous avez remarqué. Je me demande même depuis combien de temps je n’avais pas
prononcé ce mot. Il me semble qu’il a été remplacé, dans le vocabulaire courant,
par un autre, plus djeun’s, plus dynamique, plus facile à articuler : le
freesbee.
Alors pour essayer de
comprendre ce qu’est réellement un boomerang, j’ai décidé de réunir un maximum
d’informations sur ce produit désuet, et aussitôt je décidais de plonger dans
son intimité, de remonter son histoire, de déchiffrer son arbre généalogique.
Je me suis également plongé dans la revue technique pour essayer d’appréhender
ses caractéristiques propres, de quel bois il était fait, ses performances par
temps sec ou pluvieux, sa vie en tant qu’objet, ses loisirs, ses sentiments,
ses pratiques sexuelles, parce que tout le monde sait que les mœurs varient
d’un pays à un autre et que le boomerang d’Australie ne se comporte pas comme
celui d’Amazonie en période de chaleur.
Le boomerang aborigène,
celui auquel j’ai prêté une attention toute particulière, est construit à
partir d'un morceau de bois taillé dans une branche d'acacia ou d'eucalyptus.
La forme du boomerang est ébauchée à la hache, chauffée au-dessus d'un feu de
bois, puis courbée pour prendre sa forme définitive. Enfin il est travaillé
avec un silex, poli avec du sable, puis peint. Je suis resté admiratif quant à
la qualité, la patience, la précision du travail pour réaliser un tel truc, et
c’est, les larmes au bord des yeux que j’ai eu envie de dire, de crier,
« mais qu’est ce que tu te fais chier, t’en as des pleins rayons chez tous
les discounteurs du coin ! »
Non, réellement, si je me
suis intéressé au boomerang, c’est parce que j’ai lu une histoire il n’y a pas
très longtemps, racontant la mésaventure d’un américain, qui après avoir lancé
un boomerang, le reçu en retour en pleine tête. Et au lieu d’aller se cacher,
lui et sa face de débile, sans doute pressé par des avocats peu scrupuleux, il
préféra porter plainte. Étonnant pour un américain. Alors que je vous
raconte : Larry
Rutman, un habitant du Kentucky, s’amusait à lancer un boomerang dans un parc,
quand celui-ci est revenu vers lui par un effet naturel appelé « boomerang »
justement, et le frappa à la tête.
L’accident
ayant causé des dommages durables à sa mémoire, le pauvre, il songea dans un
premier temps à porter plainte contre le fabricant, mais son avocat le lui
déconseilla, car le boomerang fonctionnait parfaitement bien. De par le fait. M
Rutman décida donc de s’attaquer lui-même en justice, en réclamant 300 000
dollars de dommages et intérêt pour sa maladresse. Et le juge lui a donné
raison.
Et cette anecdote m’a tout
de suite fait penser à une autre, génialissime, qui pourtant n’a rien à voir
mis à part cette propension à l’extrême dans lequel l’homme excelle.
Elle nous vient tout droit
de Bali en Indonésie, où un jeune garçon a été surpris en pleine relation
sexuelle avec une vache. Jusque-là, rien de bien grave, on retrouve la même
pratique dans nos campagnes, dans des coins isolés de toute féminité tarifée.
C’est un peu comme « l’amour est dans le pré » sauf que dans
l’émission, c’est des vieux bedonnants qui se tapent des grosses vaches, pas un
adolescent. Mais là où ça devient intéressant, c’est que suite à ce flagrant
délit, la justice a contraint le garçon à épouser l’animal. Des fois qu’elle
tombe enceinte, tu penses, imagine le scandale dans le village.
Allez, je vous raconte :
« Ngurah Alit, 18 ans, un jeune chômeur du village côtier de Yeh Embang à
Jembrana, a été surpris nu, dans une rizière, à l'arrière d'une vache. Forcé par
la justice d'épouser l'animal, il s'est évanoui au cours de la cérémonie à
laquelle ont assisté une centaine de curieux, pendant que la mère de
l'adolescent pleurait avec hystérie et que la police tentait d'empêcher aux
journalistes d'assister au spectacle. Car comme le veut le Pecaruan, tradition
balinaise, une cérémonie doit être réalisée pour purifier le village de l'acte
impie d'un homme s'étant uni à une vache. » Je note juste que si c’est inscrit
dans un texte traditionnel, ça doit être assez fréquent dans cette région du
globe. Mais passons. « Pour sa défense, Alit a admis avoir agi par
bestialité, mais a affirmé que la vache, qu'il croyait être une jeune et jolie
jeune fille, l'avait charmé avec des compliments flatteurs. » Rien
que ça !
Et la vache alors, qu’est-elle
devenue la vache vous me direz ? Bah la pauvre bête a fini noyée dans
l'océan. Me demandez pas pourquoi. Sans doute pour la punir d’aguicher les
pauvres innocents avec ses œillades tendancieuses.
Et donc voilà ! Deux
pays, deux cultures, mais une seule et unique stupidité. Je ne sais pas laquelle
des deux est la plus ridicule, mais moi j’écrirais bien une petite fable la
dessus : « la vache et le boomerang. » Un truc qui se passerait
pendant la guerre, et parlerait des riches et des pauvres, des profiteurs et des
travailleurs, le profiteur n’étant pas celui que la morale capitaliste veut
nous faire croire. Et à la fin, le plus pourri de tous crèverait dans d’atroces
souffrances.
Alors, pour votre
information, ce soir j’aurai prononcé le mot boomerang 17 fois, presqu’autant
que dans toute ma vie. Ca vous fait une belle jambe, mais je vous le dis quand
même. Et « comme la musique commence là où s’arrête le pouvoir des mots »
je vous propose d’écouter « Comme un boomerang » de Serge Gainsbourg,
qui lui ne le dit que 9 fois durant toute la chanson.
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