Instant Décalé #38
Comme chaque année, un lot
de mot nouveau a été nominé pour faire son entrée dans les dictionnaires
français. Comme chaque année, il fait son apparition avec le même enrobage
médiatique, costume sombre et pipe en ivoire. Comme chaque année, le nouvel
arrivage est déballé sur un tapis brodé, au même titre que de la viande plus très
fraîche sur les marches usées de Cannes, ou des milliers de ballons amères d’un
beaujolais nouveau, dont la tradition exonère les côtés pervers.
A partir de bientôt,
sachez que nous pourrons retrouver sur les nouveaux modèles extra large de
papier fané, des mots, très tendances dans les rayons de BFN tv, à savoir, « fichés
S » « cyberdéfense » et « revenants. » Même si
celui-là, il me semblait qu’il y figurait déjà. En fait, c’est juste la définition
qui change : aujourd’hui, un revenant c’est un djihadiste qui revient dans
son pays d’origine après avoir combattu. Je préférais quand même la définition
initiale, celle du fantôme, celui qui revient, mais mort, zigouillé,
exterminé !
On a aussi le mot « violences-faites-aux-femmes »
qui s’écrit, du verbre écrire et non crier, qui s’écrit disais-je, en quatre mots.
On trouve aussi « frotteur », « grossophobie », « animalisme »
et « démocrature ». Et bien sûr, les incontournables, les « cosplay »
« replay » « drive » « running » « e-sport »
« queer » « hoverboard » « darknet » et « SUV ».
Alors ça, si c’est pas un signe d’ouverture sur le monde, de tolérance,
d’acceptation. Par contre, il me semble pas avoir vu le mot « Allah Akbar »,
pourtant très en vogue chez les mêmes professionnels de l’info de BFN tv.
Et enfin, enfin, parmi
toutes ces merveilles, mon préféré. Mon p’tit chouchou. Le mot… Dégagisme. Un
mot qui, je me permets de prendre parti, devrait y figurer depuis plus d’un
siècle. Depuis la naissance de l’anarchisme en fait. Dégagisme, un mot jeune,
frais et dynamique, à prononcer sans modération.
Par contre, je constate
encore, cette année, avec un fort dépit assaisonné de quelques menues secousses
de désappointement, que le mot « solitudinale » n’a pas encore été
accepté dans le dico. Mais je ne désespère pas. Treize ans que je le propose, le
comité de sélection va bien finir par le faire rentrer dans ce gros bouquin, dont
les trois quart de la populace ignore l’existence.
La solitudinale, je vous
explique, c’est un principe mathématique qui régit la solitude, et dont
l’équation, très simple, s’écrit ainsi : 1+0=1 et 1+0+0=1 et 1+0+0+0=
toujours 1 ! Etc, etc jusqu’à l’infini, +1 … Pour résumer, ça démontre
que, quoi qu’il arrive, quand tu es accompagné de personne, tu es seul !
Et peu importe le nombre d’absence de personne, tu seras toujours seul. Voilà
la définition très concise de ce qu’est la solitudinale. Je ne comprends pas
pourquoi le comité d’admission n’a pas encore validité son entrée dans le dico.
Il y a de ces injustices quand même ! Prenez l’exemple du mot pourriture. Alors
pourriture, oui, je le conçois, apparait bien dans le petit Robert et le
Larousse illustré. Mais pas dans celui des synonymes. J’ai bien vérifié dans
les 3 éditions que j’ai en ma possession, le terme « pourriture »
n’apparait jamais associé aux mots « politicien » et
« banquier ». On se demande bien pourquoi. Peut-être que, enfin c’est
ce que je pense, la putréfaction de sus nommé étant intérieur et donc non
apparente, les académiciens en charge des dossiers ont pu penser que
l’abominable odeur de merde qui se dégageait de la pourriture, venait de leur
propre décomposition et non des synonymes qui leur fut proposé. Mais ce n’est
qu’une supposition.
Allez, assez parlé, assez
de spéculation, assez de médisance, loin de moi l’idée de lancer un mouvement
résistance ou de destruction. Les révolutions, on sait ce que ça donne. On
retire le pouvoir aux pourritures d’un vieux régime pour l’octroyer aux racines
gangrénées d’un nouveau régime. L’avidité est dans l’ADN de l’homme, on le
changera pas.
Mais point de déprime ici,
mes amis. Musique ! Personne ne l’ignore désormais « la musique
commence là où s’arrête le pouvoir des mots ! » Alors, musique ! Ecoutons
tout de suite ce vieux chant des partisans italiens remis au goût du jour par
une série espagnole,
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